La doctorante en études cinématographiques à l’Université de Montréal approfondit le concept de « cinécare » en recherche-création.
Lou Andrysiak
Lisa Mélinand a débuté cet automne son doctorat sous la direction de Santiago Hidalgo, directeur exécutif du partenariat cinEXmedia. Dans le cadre de ses recherches, elle souhaite proposer un regard nouveau sur le cinéma du point de vue de la conception et de la diffusion. Elle se penche sur les notions d’inclusion, de représentation ainsi que d’accessibilité et elle approfondit le concept de « cinécare » dans un projet de recherche-création inédit.
La doctorante développe une plateforme de diffusion en continu inclusive, accessible et écologique, sur laquelle le public pourra retrouver des films aux vertus thérapeutiques. Elle compte ensuite étudier, avec l’aide de thérapeutes, les bienfaits de la réception des films diffusés sur sa plateforme sur leur auditoire.
Une telle démarche renvoie à la notion de « cinécare », qui correspond aux différentes manières dont le cinéma peut être conçu d’un point de vue thérapeutique, « aussi bien dans son écriture et dans son langage que dans sa production, sa diffusion et dans l’éducation à l’image qui en découle ». « L’une des principales questions que je me pose, précise la doctorante, est la suivante : comment le cinéma, au niveau du scénario, du son, des décors, des dialogues, des silences, de l’esthétisme ou encore des mouvements de caméra, peut-il avoir un impact sur le système cognitif ? »
Vers un cinéma de prévention
C’est lors de ses études de master (maîtrise) en France que la doctorante a découvert l’existence de cinEXmedia. Les valeurs et les objectifs du partenariat l’ont immédiatement rejointe. « C’est le seul laboratoire au monde qui se questionne sur le potentiel thérapeutique du cinéma. C’est extraordinaire ! » Après avoir pris contact avec le chercheur André Gaudreault, elle a décidé de s’inscrire à l’Université de Montréal.
Vivant elle-même avec un diagnostic de troubles de surdité et de neuroatypie, elle a voulu s’intéresser à la « réception spectatorielle des personnes en situation de handicap ». « Tout le monde doit pouvoir voir les films, sur un pied d’égalité », affirme-t-elle.
Lisa Mélinand dit vouloir développer un « cinéma de prévention ». Dans les sciences de la santé, en général, explique-t-elle, « il y a trois phrases de prévention : prévenir en amont, lutter contre les aggravations et éviter que la maladie réapparaisse ». En repensant le cinéma grâce à cette approche, il serait possible selon elle de se servir « des nouvelles technologies pour donner à voir un monde moins anxiogène » et ainsi mener une démarche préventive auprès de publics plus vulnérables.
Le soutien de cinEXmedia
Les membres de cinEXmedia ont accueilli son projet avec beaucoup d’enthousiasme. André Gaudreault et Santiago Hidalgo ont « toujours cru en ce projet et en mes capacités », raconte-t-elle. « André Gaudreault m’a même soutenue pendant mon processus d’immigration au Canada. C’est merveilleux de rejoindre autant de chercheur·euses qui partagent les mêmes valeurs que moi, même s’iels ne sont pas en situation de handicap. Cela nous permet de réfléchir ensemble et d’approfondir les sujets de ma thèse tout en répondant aux objectifs du laboratoire. »
Les recherches de Lisa Mélinand, qui s’inscrivent dans une perspective d’accessibilité, rejoignent effectivement l’axe de recherche de cinéma inclusif du partenariat. La doctorante est également auxiliaire de recherche pour celui-ci. Dans le cadre de ce contrat, elle est amenée, entre autres, à tester et à questionner la présence ou l’absence de dispositifs adaptés aux personnes en situation de handicap au sein des salles de cinéma de Montréal.
Par son travail d’auxiliaire comme par ses recherches doctorales, elle vise à permettre aux cinéphiles et au milieu académique de « se comprendre mutuellement, de développer leur imaginaire collectif et de les aider à appréhender le cinéma ensemble ».