Le centre de recherche, anciennement appelé CRITAC, collabore avec cinEXmedia pour rassembler des expert·es en cinéma et en arts vivants, dans une optique d’innovation sociale.
Olivier Du Ruisseau
Le Centre de recherche sur le potentiel humain (HUPR), associé à l’École nationale de cirque, est récemment devenu partenaire de cinEXmedia. Les deux organismes souhaitent désormais rassembler des expert·es en cinéma et en arts vivants, dans le but d’optimiser l’impact social de leurs disciplines respectives. Dans la foulée de la création de ce nouveau partenariat, nous avons discuté avec des membres de l’équipe du centre HUPR, afin de mieux comprendre son fonctionnement.
En plus de ses travaux de recherche axés sur les arts vivants et le « potentiel humain », HUPR « offre de l’aide technique et des formations pour soutenir les professionnel·les ainsi que les organisations du secteur », résume Marianella Michaud, chargée de projet – développement et innovation chez HUPR. « Les quatre axes de recherche de HUPR, soit les technologies numériques, la performance humaine, le design d’équipement et l’innovation sociale, permettent à chaque projet mené au centre d’évaluer l’impact tangible des arts vivants, poursuit-elle. En anticipant les défis d’un monde en constante évolution, HUPR s’engage à concevoir des solutions audacieuses et novatrices. Depuis sa création, le centre de recherche démontre que l’impossible devient réalisable lorsque l’innovation, la science et les arts convergent. »
Marianella Michaud cite à titre d’exemple un projet mené avec un duo de main à main. « Les artistes ont inversé les rôles de porteur et voltigeuse dans leur numéro, explique-t-elle. Avec une approche ethnographique, nous nous sommes questionné·es sur les origines des rôles des genres dans ce type de numéro. Nous allons ensuite mener des ateliers de médiation, notamment pour mesurer l’impact des changements apportés aux représentations traditionnelles sur le public, mais aussi pour analyser ce que cela a suscité du point de vue des artistes. »
Emmanuel Bochud, directeur du développement et de l’innovation, affirme d’ailleurs que « toute la recherche effectuée chez HUPR est de la recherche appliquée ». « Nous sommes associé·es à l’École nationale de cirque, mais nous travaillons essentiellement pour l’industrie des arts vivants, tout le secteur de la culture et le grand public, dans une perspective d’innovation sociale. »
La maladie de Parkinson, « au-delà des tremblements »
Le projet Piece of Mind (2021), de la chercheuse postdoctorale Naila Kuhlmann (HUPR), est à l’image de la mission de l’organisme, qui souhaite s’impliquer davantage dans sa communauté. « C’était mon premier projet postdoctoral, raconte la chercheuse. J’ai réuni des personnes atteintes de la maladie de Parkinson, des neuroscientifiques et des artistes, dans le but de faciliter un échange de connaissances, pour créer un spectacle qui communique à la fois la recherche scientifique et l’expérience vécue de la maladie. Ce projet est né à la suite de mon doctorat en neurosciences, dans lequel j’étudiais la maladie de Parkinson, mais qui ne m’offrait que très peu de contacts avec les personnes concernées. »
« À chaque session de travail, poursuit-elle, nous avons abordé un sujet différent, à la fois du point de vue de la science et de l’expérience vécue. C’était une véritable expérience de cocréation, qui tenait compte de l’apport de chaque personne consultée. Notre objectif était de représenter la maladie, au-delà des tremblements. Par exemple, nous avons créé un numéro de slackline autour d'un poème intitulé « Sur le fil », dans lequel une participante vivant avec la maladie utilise la métaphore du funambule pour partager son expérience. Nous avons également intégré des scènes plus comiques, dont une où une personne illustre ses symptômes en inversant les rôles avec les autres interprètes. Nous avons ensuite mené une recherche qualitative sur l’expérience des participants à la cocréation et l’impact sur le public. »
Le spectacle a été filmé en 2021, présenté devant public à l’Agora du Cœur des sciences de l’UQAM en 2022, puis au Atlanta Science Festival en 2024. Une série de reportages audiovisuels sur les coulisses du projet est aussi disponible sur la page YouTube du collectif Piece of Mind. Naila Kuhlmann a également cosigné plusieurs articles scientifiques présentant les conclusions du projet, notamment un publié l’an dernier avec Aliki Thomas, Rebecca Barnstaple et sa directrice de recherche, Stefanie Blain-Moraes, dans l’International Journal of CoCreation in Design and the Arts (Journal international de la co-création dans le design et les arts). Plus récemment, elle a cosigné un autre article dans la revue Frontiers in Psychology.
Du CRITAC au centre HUPR
Avant de s’appeler HUPR, l’organisme portait le nom de Centre de recherche, d’innovation et de transfert en arts du cirque (CRITAC). Le changement s’est imposé afin d’ouvrir les activités du centre à d’autres disciplines, explique Emmanuel Bochud : « Le regard que l’on porte sur les arts vivants peut très bien se transférer à d’autres domaines en lien avec la performance humaine au sens large. »
L’équipe de HUPR s’est affairée à changer de nom au moment même où elle entamait des démarches pour devenir partenaire de cinEXmedia. « Nos deux organismes ont plusieurs atomes crochus, affirme Emmanuel Bochud. Ils travaillent tous les deux sur le rythme, dans une perspective intersectorielle, ainsi que sur des projets d’innovation sociale. »
C’est pourquoi, renchérit Naila Kuhlmann, « nous souhaiterions rassembler des expert·es en cinéma et en arts vivants, dans le cadre d’un colloque, par exemple, pour mieux comprendre comment ces disciplines peuvent travailler ensemble, particulièrement pour les personnes aînées ». Les équipes de HUPR et de cinEXmedia doivent se rencontrer plus tard cette année afin de préparer ce projet commun.