Un nouveau cours fait dialoguer le cinéma et les sciences

Tho­mas Car­rier-Lafleur revient sur le cours offert pour la pre­mière fois l’été der­nier, à l’Université de Mont­réal, qui a été pen­sé comme un pro­lon­ge­ment des acti­vi­tés du par­te­na­riat cinEXmedia.

Pho­to : cour­toi­sie de Caro­line Mar­tel | Une image tirée du film Le fan­tôme de l'opératrice (Caro­line Mar­tel, 2006)

cinEXmedia sou­haite mul­ti­plier ses acti­vi­tés péda­go­giques à l’intersection du ciné­ma et des sciences pures dans les pro­chaines années.  Un nou­veau cours pré­sen­té l’été der­nier à l’Université de Mont­réal est deve­nu le pre­mier à s’inscrire dans cette pers­pec­tive. Conçu sous la forme d’un sémi­naire favo­ri­sant la dis­cus­sion, il accueillait chaque semaine des invité·es issu·es des milieux aca­dé­mique et cultu­rel, qui abor­daient un sujet de leur choix.

Les thé­ma­tiques pro­po­sées dans ce cours créé par San­tia­go Hidal­go étaient ins­pi­rées des axes de recherche de cinEXmedia. Elles variaient donc selon les intervenant·es, dont plu­sieurs étaient des cochercheur·ses du par­te­na­riat, cou­vrant un large éven­tail de sujets : expé­riences scien­ti­fiques autour du mon­tage, archives audio­vi­suelles et films orphe­lins, ciné­ma scien­ti­fique, neu­ro­ci­né­ma, ciné-thé­ra­pie, etc.

Par­mi les participant·es figu­raient notam­ment Isa­belle Ray­nauld, codi­rec­trice de cinEXmedia, Maude Sills-Néron, cores­pon­sable du comi­té des acti­vi­tés étu­diantes du par­te­na­riat, ain­si que la cinéaste Caro­line Mar­tel. L’astrophysicien Oli­vier Daigle a ensuite conclu le tri­mestre avec une confé­rence inti­tu­lée « De la science à la science-fiction ».

« On a trop sou­vent ten­dance à ensei­gner les arts et les sciences pures en vases clos », déplore Tho­mas Car­rier-Lafleur, direc­teur adjoint du Labo­ra­toire Ciné­Mé­dias et coor­don­na­teur scien­ti­fique du par­te­na­riat cinEXmedia à qui on a confié l’animation des séances. « Je pense que notre cours est venu com­bler un manque impor­tant, parce que les étudiant·es du dépar­te­ment ne soup­çon­naient pas à quel point le ciné­ma pou­vait être imbri­qué avec la science », poursuit-il.

Le reflet d’une his­toire riche

Le cher­cheur explique le sep­tième art est régu­liè­re­ment envi­sa­gé sous un angle scien­ti­fique dans les milieux aca­dé­miques. Dans les pre­miers temps du ciné­ma, pré­cise-t-il, le ciné­ma­to­graphe était per­çu comme une inven­tion tech­no­lo­gique, ins­crite dans les avan­cées scien­ti­fiques de la fin du XIXe siècle, telles que la cap­ture inédite du mou­ve­ment des êtres vivants et la recherche en optique.

Qu’il s’agisse de fic­tion ou de docu­men­taire, le ciné­ma est éga­le­ment à la fois un outil de vul­ga­ri­sa­tion scien­ti­fique, et de poé­ti­sa­tion du scien­ti­fique. « Encore aujourd’hui, après toutes ses trans­for­ma­tions, le ciné­ma per­met de révé­ler une forme de poé­sie dans la science que celle-ci ne peut mon­trer seule », remarque l’animateur du sémi­naire. Il cite à titre d’exemples le ciné­ma de Jean Pain­le­vé ou encore le pro­jet Cadavre exquis, diri­gé par André Habib, cocher­cheur membre de cinEXmedia qui est éga­le­ment inter­ve­nu lors du cours.

Enfin, le ciné­ma peut direc­te­ment contri­buer à la recherche en sciences pures. La ciné-thé­ra­pie, par exemple, explore les ver­tus thé­ra­peu­tiques du ciné­ma, qu’il s’agisse de pro­gram­mer des films pour des clien­tèles ciblées ou d’analyser ses effets psy­cho­lo­giques et phy­sio­lo­giques. Tho­mas Car­rier-Lafleur men­tionne à cet égard cer­tains pro­jets sur le sujet menés par le Labo­ra­toire Ciné­Mé­dias, les­quels ont fait l’objet d’une pré­sen­ta­tion par les doctorant·es Yann Gui­zaoui et Lisa Méli­nand dans le cadre du cours. Cores­pon­sable des acti­vi­tés étu­diantes de cinEXmedia, Lisa Méli­nand aborde d’ailleurs la ques­tion sous l’angle de l’accessibilité et de l’anticapacitisme dans sa recherche doctorale.

C’est pour­quoi Tho­mas Car­rier-Lafleur estime que les études ciné­ma­to­gra­phiques doivent « être prises au sérieux, comme tous les autres champs de recherche ». « Le ciné­ma, grâce à sa nature pro­fon­dé­ment acces­sible, peut avoir de pro­fonds impacts sur nos vies. Il est essen­tiel de conti­nuer à l’étudier en pro­fon­deur, et cela doit pas­ser, entre autres, par une consi­dé­ra­tion scientifique. »