Portrait : Adriana Lacerda et le potentiel intersectoriel de l’audiologie

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La pro­fes­seure agré­gée à l’École d’orthophonie et d’audiologie de l’Université de Mont­réal s’est récem­ment jointe au par­te­na­riat cinEXmedia à titre de cochercheuse.

Adria­na Lacer­da | Pho­to : cour­toi­sie de la chercheuse

La cher­cheuse Adria­na Lacer­da, qui vient de se joindre à cinEXmedia, espère appor­ter au sein du par­te­na­riat sa vaste exper­tise de recherche en audio­lo­gie, axée sur « la pro­mo­tion de la san­té audi­tive et la pré­ven­tion de la perte audi­tive, mais éga­le­ment sur les troubles de com­mu­ni­ca­tion liés à la perte audi­tive », explique-t-elle.

Ces enjeux sont au cœur de ses recherches depuis le début de son par­cours aca­dé­mique à l’Universidade Tuiu­ti do Paraná, au Bré­sil. « J’ai tou­jours été inté­res­sée par la san­té audi­tive, parce que c’est un phé­no­mène au cœur de la com­mu­ni­ca­tion, pour­suit-elle. Il faut bien entendre pour bien com­mu­ni­quer, sinon l’inclusion aux groupes et la par­ti­ci­pa­tion sociale peuvent s’avérer difficiles. »

Au Qué­bec, la cher­cheuse a su déve­lop­per des col­la­bo­ra­tions fécondes au sein de réseaux ins­ti­tu­tion­nels, com­mu­nau­taires et inter­na­tio­naux d’envergure. Sa nomi­na­tion, en mars 2019, au poste de direc­trice du labo­ra­toire de recherche Audi­tion et vieillis­se­ment du Centre de recherche de l’Institut uni­ver­si­taire de géria­trie de Mont­réal (CRIUGM) en témoigne. La mis­sion de cet orga­nisme consiste à « mieux com­prendre les par­cours de vieillis­se­ment à par­tir d’une vision holis­tique des inter­ac­tions entre le corps, le cer­veau, et l’environnement et à déve­lop­per des solu­tions inno­vantes favo­ri­sant la san­té et le bien-être des per­sonnes aînées », dit-elle.

Adria­na Lacer­da déplore d’ailleurs que les pro­blé­ma­tiques liées à la san­té audi­tive soient peu explo­rées dans la recherche scien­ti­fique au Qué­bec : « On ne porte pas suf­fi­sam­ment atten­tion aux enjeux de l’audiologie. Il y a un grand manque par rap­port à toutes les inter­ven­tions qui visent à opti­mi­ser la com­mu­ni­ca­tion ou à amé­lio­rer les ser­vices auprès des per­sonnes âgées mal­en­ten­dantes, et mes inté­rêts de recherche y étaient par­ti­cu­liè­re­ment liés. »

C’est pour­quoi la cher­cheuse a mul­ti­plié les pro­jets au sein de ses dif­fé­rents réseaux : pen­sons à ses recherches sur les impacts des aides audi­tives sur la qua­li­té de vie des per­sonnes âgées ou encore à ses efforts pour mieux outiller les futur·es préposé·es aux béné­fi­ciaires quant aux enjeux de com­mu­ni­ca­tion avec les aîné·es ayant des pro­blèmes audi­tifs. Elle par­ti­cipe éga­le­ment à un pro­jet de « labo­ra­toire vivant » inti­tu­lé Bri­ser l’isolement social des aîné[·e]s de Côte-des-Neiges : un quar­tier inno­vant en mode Living Lab, dont le volet sur la com­mu­ni­ca­tion, explique-t-elle, vise « la démys­ti­fi­ca­tion des défis com­mu­ni­ca­tion­nels propres au vieillis­se­ment et le rap­pro­che­ment des com­mu­nau­tés cultu­relles et des générations ».

Le début d’une riche col­la­bo­ra­tion avec cinEXmedia

L’idée de s’associer au par­te­na­riat cinEXmedia lui est venue lors d’une col­la­bo­ra­tion avec Audi­tion Qué­bec, un orga­nisme com­mu­nau­taire ayant pour mis­sion d’encadrer et de favo­ri­ser l’inclusion sociale des per­sonnes mal­en­ten­dantes. « Audi­tion Qué­bec avait déjà un peu réper­to­rié les salles de ciné­ma pos­sé­dant des dis­po­si­tifs d’écoute pour les per­sonnes mal­en­ten­dantes, raconte la cher­cheuse, mais l’organisme n’avait pas davan­tage d’informations sur l’utilisation de ces salles et sur les défis qui y sont liés. »

C’est à ce moment qu’elle a pen­sé au pro­fes­seur San­tia­go Hidal­go et à son équipe afin de non seule­ment réper­to­rier plus assi­dû­ment les ciné­mas adap­tés à la clien­tèle mal­en­ten­dante, mais éga­le­ment sen­si­bi­li­ser cette clien­tèle – ain­si que le per­son­nel des salles – à l’utilisation de ces dis­po­si­tifs. « Notre objec­tif, sou­tient Adria­na Lacer­da, c’est de tra­vailler ensemble dans le but de rendre les salles de ciné­ma plus acces­sibles et équi­tables, qu’elles soient com­mer­ciales ou non com­mer­ciales, comme dans les CHSLD. »

Cette ini­tia­tive a ouvert la porte à une réflexion plus pro­fonde sur les pos­si­bi­li­tés inter­sec­to­rielles d’un jume­lage entre les dis­ci­plines de l’audiologie et des études ciné­ma­to­gra­phiques et audio­vi­suelles. « Nous n’avons pas vrai­ment de don­nées pro­bantes sur les bien­faits thé­ra­peu­tiques du ciné­ma pour une popu­la­tion adulte vieillis­sante qui a besoin de par­ti­ci­per à la socié­té et d’avoir des inter­ac­tions avec dif­fé­rents groupes d’âge, sou­tient la cher­cheuse. Il y a plein de nou­veaux pro­jets que l’on pour­rait déve­lop­per ensemble, afin d’explorer tous les avan­tages et les bien­faits du ciné­ma pour la par­ti­ci­pa­tion sociale et l’optimisation de la qua­li­té de vie. »

C’est le cas notam­ment du pro­jet de « labo­ra­toire vivant » à Côte-des-Neiges au sein duquel la cher­cheuse est déjà impli­quée. « On sou­haite que San­tia­go [Hidal­go] et son équipe par­ti­cipent à une deuxième phase du labo­ra­toire, dit-elle, parce que ça nous don­ne­rait la chance de déve­lop­per de nou­veaux pro­jets inter­sec­to­riels san­té-culture. On a un énorme poten­tiel d’innovation sociale avec ces Living Labs. Les tech­no­lo­gies audio­vi­suelles aident aus­si énor­mé­ment, de façon géné­rale, à sen­si­bi­li­ser le grand public aux enjeux liés à la san­té auditive. »

Ce nou­veau par­te­na­riat inter­sec­to­riel entre Adria­na Lacer­da et cinEXmedia favo­ri­se­ra la ren­contre entre deux dis­ci­plines qui opèrent tra­di­tion­nel­le­ment de manière sépa­rée, ouvrant ain­si un vaste éven­tail de pos­si­bi­li­tés à la fois pour l’audiologie et pour les études ciné­ma­to­gra­phiques et audio­vi­suelles.