Katia A. Morales Gaitán fait briller le cinéma autochtone mexicain à Montréal

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La doc­to­rante, qui tra­vaille aus­si comme com­mis­saire indé­pen­dante, a invi­té des cinéastes autoch­tones mexi­cains à venir pré­sen­ter leurs films au Québec.

Les 14 et 15 juin der­niers, dans le cadre du cycle de pro­jec­tions Tra­ver­sées Sud-Est. Ciné­ma et droit d’autoreprésentation au Mexique, la cher­cheuse et com­mis­saire Katia A. Morales Gaitán a pré­sen­té deux longs métrages ain­si que des films autoch­tones mexi­cains expé­ri­men­taux à la gale­rie Espa­cio Méxi­co de l’Institut cultu­rel du Mexique, à Mont­réal. Grâce au sou­tien de cinEXmedia, elle a même pu invi­ter cer­tains des cinéastes présenté·es à venir ren­con­trer les ciné­philes montréalais·es.

C’est en s’apercevant que Maman (Xun Sero, 2022), un docu­men­taire tsot­sil, avait été sélec­tion­né au pres­ti­gieux Fes­ti­val inter­na­tio­nal du film docu­men­taire d’Amsterdam (IDFA) que Katia A. Morales Gaitán a eu l’idée de mettre sur pied un pro­gramme de pro­jec­tion de films entiè­re­ment dédié aux cultures autoch­tones mexicaines.

« Même si l’on compte plus de 500 000 locuteur·rices de la langue tsot­sil dans le monde, très peu de films sont pro­duits dans cette langue et rendent compte de la culture autoch­tone du Mexique, sou­tient la cher­cheuse. J’ai donc été très tou­chée lorsque j’ai appris que ce film avait pu jouir d’une telle recon­nais­sance. J’étais très heu­reuse de consta­ter que de plus en plus de jeunes cinéastes reçoivent du finan­ce­ment public et s’illustrent à l’international, c’est pour­quoi j’ai vou­lu leur rendre hom­mage ici, à Montréal. »

Un public atten­tif au Québec

La cher­cheuse avait déjà pré­sen­té un pro­gramme de films sur des réa­li­sa­trices mexi­caines à la gale­rie Espa­cio Méxi­co un an plus tôt. Ce centre cultu­rel, sou­te­nu par le consu­lat du Mexique à Mont­réal, s’est alors impo­sé comme un par­te­naire de choix pour ce nou­veau cycle de pro­jec­tions. « Le consu­lat m’a aus­si beau­coup aidée à coor­don­ner l’arrivée des invité·es, se réjouit Katia A. Morales Gaitán. J’étais très contente de pou­voir leur faire visi­ter Mont­réal et de leur faire réa­li­ser qu’ils et elles ont un public atten­tif au Qué­bec, où la culture autoch­tone est très dif­fé­rente, mais tout aus­si importante. »

La doc­to­rante pré­cise qu’au Mexique, « les cultures sont beau­coup plus métis­sées » qu’au Qué­bec, où « les Autoch­tones sont encore confiné·es dans des réserves ». Les Autoch­tones mexicain·es, dont les Tsot­sils, « ont éga­le­ment subi énor­mé­ment de vio­lences colo­niales, ce qui se reflète entre autres dans le sous-finan­ce­ment de leur ciné­ma, dit-elle, quoiqu’on com­mence tran­quille­ment à faire entendre leurs voix ».

Pour sa pro­gram­ma­tion, Katia A. Morales Gaitán a sélec­tion­né deux longs métrages, un pour chaque jour­née de pro­jec­tion : Maman (Xun Sero, 2022) et Vay­chi­le­tik (Juan Javier Pérez, 2022). Juan Javier Pérez a d’ailleurs eu la chance de pré­sen­ter lui-même son film lors de l’événement. Trois courts métrages, dont des films expé­ri­men­taux et des docu­men­taires, ont aus­si été pro­je­tés à chaque jour, pour un total de huit films présentés.

Une « pro­fonde authenticité »

Les deux longs métrages pro­je­tés ont été réa­li­sés par le col­lec­tif Ter­ra Nos­tra, ori­gi­naire de Los Altos, dans le Chia­pas, au Mexique. « Empreints d’une pro­fonde authen­ti­ci­té », ces films « incarnent une nou­velle ère pour le droit à l’autoreprésentation, à l’accès à la culture et à la pro­duc­tion artis­tique au sein des Tsot­sils », affirme la com­mis­saire dans un com­mu­ni­qué de presse au sujet de l’événement. Les autres vidéos expé­ri­men­tales et courts métrages pré­sen­tés, réa­li­sés par le col­lec­tif Demi­na Labo­ra­to­rio de Artes, « nous emmènent quant à eux dans l’atmosphère d’Acapulco, une ville bal­néaire mexi­caine autre­fois gla­mour qui fait aujourd’hui face à des réa­li­tés socio-éco­no­miques dif­fi­ciles et à un cli­mat de vio­lence l’éloignant de la quié­tude qu’elle connais­sait jadis », indique-t-elle.

Socio­logue de for­ma­tion, Katia A. Morales Gaitán effec­tue son doc­to­rat en cotu­telle à l’Université de Mont­réal, sous la direc­tion d’André Gau­dreault, et à l’Université Sor­bonne Nou­velle (Paris-3), avec Laurent Cre­ton. Ses recherches portent sur le poten­tiel de la tech­no­lo­gie des chaîne de blocs à finan­cer le ciné­ma indé­pen­dant. Ciné­phile, elle tra­vaille éga­le­ment dans le milieu cultu­rel depuis plu­sieurs années, orga­ni­sant des pro­grammes de films auprès de divers organismes.

Forte du suc­cès de Tra­ver­sées Sud-Est, elle entend « col­la­bo­rer à nou­veau avec Espa­cio Méxi­co, peut-être dès l’an pro­chain, pour conti­nuer à faire briller le ciné­ma mexi­cain au Québec ».